L'Industrie du Logiciel en France : une analyse et des propositions pour l'enseignement et la recherche

Il y a environ un an, je sortais d'une réunion au ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche avec la charge d'animer, en collaboration avec Gérard Ladier, un groupe de travail qui devait s'atteler à réfléchir aux enjeux de l'Industrie du Logiciel en France.

On nous demandait en particulier de formuler des propositions concrètes et, si possible, originelles, pour accompagner le développement de ce secteur stratégique, dans lequel la France a des atouts importants, et pour lequel la France ne doit pas se réduire à un réseau de distribution de technologie venant d'ailleurs.

Le fruit de ce travail, qui résume les analyses et les propositions de personnes venant d'horizons assez différents, est aujourd'hui disponible sous la forme d'un rapport, qu'on peut télécharger ici.

Rapport sur l'Industrie du Logiciel

Les propositions formulées dans ce document sont de différentes natures: il est question par exemple de généraliser l'enseignement de l'Informatique, de mieux valoriser et accompagner le développement logiciel de qualité, de mettre en place une infrastructure mutualisée pour le développement collaboratif, de former les décideurs aux spécificités du logiciel (pour lequel les mécanismes traditionnels du brevet sont inopérants ou néfastes), d'adapter les instruments fiscaux afin de favoriser l'innovation, et non pas l'optimisation fiscale.

Évidemment, ce rapport présente une vision qui est le résultat du travail d'un groupe, et ne reflète pas forcément sur tous les sujets le point de vue de chacun de ses intégrants.

Ce document a été remis au ministére de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche et fait désormais partie des documents sur lesquels peut s'appuyer la reflexion de nos institutions.

Comments

1. On Wednesday, June 29 2011, 11:09 by Jacques Baudé

Bonjour,

Un rapport fort intéressant dont nous ferons état sur le site EPI (epi.asso.fr)
et bravo pour la Proposition n°2 : Faire de l’informatique une discipline à part entière dans l’enseignement secondaire, et créer les corps d’enseignants, les concours de recrutement et les corps d’inspection correspondants.
Bien cordialement
JB

2. On Saturday, July 16 2011, 11:48 by Philippe-Charles Nestel

Je tiens à exprimer de nombreux points de désaccord,
avec ce rapport - quand bien même évoquerait-il le "logiciel libre"-,
même si je peux comprendre qu'il répond
à une demande du ministère de l'Enseignement Supérieur
et de la Recherche qui s'inscrit dans le contexte
du grand emprunt, et peux très bien admettre qu'il
" présente une vision qui est le résultat du travail
d'un groupe, et ne reflète pas forcément sur tous les sujets
le point de vue de chacun de ses intégrants.".

Pour autant, avant de formuler mes critiques, je partage,
y compris avec le Syntec dont certaines des propositions
se retrouvent formulées ici, un certain nombre d'analyses :

- "le caractère stratégique du secteur Numérique.
Réf : www.syntec-numerique.fr/c...

- la nécessité de former des personnes compétentes et motivées.
Malgré la crise, la France manque d'informaticiens

De même, je partage toutes les mises en garde contre la
brevetabilité des logiciels qui émaillent ce document.

Cela étant dit, je suis complètement abasourdi par les propositions
en matière d'enseignement qui témoignent d'une méconnaissance
totale du terrain, et ce d'autant plus que l'un des rédacteurs de ce rapport
pourrait devenir prochainement "inspecteur général en informatique"
de l'Education nationale.

1. Critiques d'ordre sémantique :
--------------------------------
a.) Le terme: "L'industrie du logiciel"
---------------------------------------
Je partage le point de vue de Richard Stallman qui
considère que le terme "industrie du logiciel" est
une métaphore trompeuse :

"Le terme « industrie logicielle » encourage les gens à penser
que le logiciel est toujours développé par une sorte d'usine
et qu'il est délivré aux consommateurs. La communauté du logiciel
libre montre que ce n'est pas le cas. Les sociétés de logiciels
existent, et diverses sociétés développent des logiciels libres
et/ou non libres, mais celles qui développent des logiciels libres
ne sont pas comme des usines.

Le terme « industrie » a été utilisé comme propagande par les avocats
en brevets logiciels. Ils appellent le développement logiciel « industrie »
et puis essaient d'argumenter que cela signifie qu'il doit être
soumis aux monopoles des brevets. Le Parlement européen, en rejetant
les brevets logiciels en 2003, a voté pour définir « industrie »
comme « production automatisée de biens ».
eupat.ffii.org/papers/eur...

Référence de son texte :
www.gnu.org/philosophy/wo...

2. L'expression: Ecosystème de l'innovation dans
le domaine du logiciel
---------------------------------------------------
Et là encore, je partage le point de vue de la Free Software
Fondation :

C'est une erreur de décrire notre communauté (ou toute communauté) comme
un « écosystème », car ce mot implique l'absence (1) d'intentions et (2)
d'éthique. Dans un écosystème, les espèces évoluent en fonction de leur
forme. Si l'une est faible, elle s'éteint, et ce n'est ni bien, ni mal,
seulement un phénomène écologique. Le terme « écosystème » suggère
implicitement une attitude passive : « Ne demandez pas comment les
choses devraient être, regardez seulement ce qui leur arrive ».

Par contraste, les êtres vivants qui adoptent une attitude active
sur leur environnement et qui ont une responsabilité éthique,
peuvent décider de préserver quelque chose qui, seule, tendrait
à s'éteindre : comme la société civile, la démocratie, les droits de
l'Homme, la paix, la santé publique, … ou la liberté des utilisateurs
d'ordinateurs.
Réf : www.gnu.org/philosophy/wo...

2. Logiciels/services/cloud computing
--------------------------------------
Le rapport considère à juste titre que :

"L’externalisation et la virtualisation des ressources de calcul,
rendues possibles par le Cloud Computing, modifient la dichotomie
traditionnelle entre licences et services"

mais sans se donner les moyens de faire une analyse critique
pour dénoncer ce point de vue erroné (depuis l'AGCS qui a modifié
la nomenclature des services en y associant les licences) mais
également dangereux du point de vue des libertés.

Là encore je partage le point de vue de Richard Stallman qui
considère :

"C'est un autre problème. Un service n'est pas un programme :
beaucoup de personnes essayent d'appliquer les concepts de
logiciel libre ou privateur aux services, mais c'est une erreur.
Pour savoir si un service est dangereux pour ma vie privée ou mes
données, il faut se poser deux questions : ce service peut-il abuser
de données, nominatives ou non ? Et prend-il le contrôle de mon
informatique ?".

[...]

"Il faut rejeter ce concept à la mode du "logiciel comme service" :
la question n'est pas de savoir si les programmes utilisés par
le serveur sont libres ou non. On peut vous donner accès au
code-source de tous les programmes utilisés par un service,
mais cela ne veut pas dire que son utilisation soit bonne pour
vous. Si, dans tous les cas, l'utilisateur perd le contrôle de son
informatique, en étant privé du droit de faire des copies par exemple,
c'est une mauvaise chose pour lui."

www.lemonde.fr/technologi...

Le débat sur ce terrain reste largement ouvert.

3. Enfin : l'Education
-----------------------
a) Le collège grand absent de ce rapport :
------------------------------------------
Ce rapport ne propose aucun enseignement de l'informatique
intégré au cursus, comme étant nécessaire à l'édification d'une
culture commune, à l'ère du numérique, mais se contente
d'évoquer l'"Amélioration de l'image et l’attractivité des métiers
de l’informatique. Cela passe principalement par un effort important
de formation et d'information des jeunes générations, dès le collège
et surtout au lycée.".

Informer sur les métiers, par exemple par un concours
"Découvrez les métiers de l’informatique et validez le B2I"
en partenariat avec l'Onisep, à destination notamment des
quelques élèves des options "Découverte des métiers", n'est
pas une réponse à la hauteur des enjeux.
Réf : www.onisep.fr/concours/in...

"soutenir des concours de programmation à différents
niveaux, au collège et au lycée, pour un public plus large que
celui visé par le concours de l’ACM.
Doté de prix attractifs (micro-ordinateurs, etc.) ces concours
peuvent faire connaître la discipline à un jeune public.", ne
peut concerner que les rares élèves membres d'un club informatique
(quand il existe) des foyers sociaux éducatifs.
Cette réponse n'est pas à la hauteur des enjeux.

b) Pour ce qui concerne les écoles primaires : la main à la pâte
----------------------------------------------------------------
Le rapport préconise, toujours dans la catégorie du gadget
"concours" de : "Favoriser et accompagner les initiatives de « main à
la pâte » dans l'Informatique, sous la forme de concours de programmation
à tous les niveaux", sans prendre en considération la réforme
de l'enseignement primaire de Xavier Darcos, qui a modifié
les rythmes scolaires, alourdi les programmes,
supprimé la journée de cours du samedi matin généralement
dédiée aux activités culturelles et à la main à la pâte.

Librement,
Charlie

3. On Saturday, July 16 2011, 16:04 by Roberto Di Cosmo

Bonjour Charlie,
merci pour ton commentaire, en lisant lequel on peut voir que tu partage l'essentiel du fond du rapport, au dela de questions terminologique qui risquent de ne pas interesser les decideurs auxquel ce texte est adresse. On compte donc bien sur toi pour relayer les nombreuses propositions sur lesquelles tu es d'accord.

Au passage, il serait sympa d'eviter de poster des commentaires cinq fois plus longs que le billet d'origine: ceci est un blog, pas un forum... :-)

4. On Monday, July 18 2011, 09:27 by Philippe-Charles Nestel

Roberto,

1) Les décideurs auquel ce rapport s'adresse sont des politiques censés servir l'intérêt général. Il importe donc que les spécialistes qu'ils consultent dressent un authentique état des lieux, afin qu'ils puissent faire les meilleurs choix.

2) Dans un rapport, il y a toujours, en tâche de fond, un tiers locuteur : le public mais aussi les communautés concernées ; la preuve, la réaction immédiate de Jacques Baudé de l'EPI. Je ne crois pas que les décideurs auxquels ce rapport s'adresse me liront, en revanche j'ai ouvert le débat pour une partie des communautés concernées.

3) Je ne partage pas ton point de vue sur la terminologie. Richard Stallman, fondateur du mouvement pour le "logiciel libre" auquel tu te réfères dans ton rapport, y est très attaché. Toutes les confusions à propos de l'informatique, tant dans les décisions catastrophiques prises depuis plusieurs décennies dans l'Educaiton, qu'au niveau des instances multilatérales qui se traduisent ensuite par des lois, ont pour origine une méconnaissance de ce qui sépare le hardware du software, les biens tangibles et physiques des objets numériques.

La crise financière que nous traversons y puise une grande partie de son origine.

Les "révolutions" du monde arabe, la montée de l'extrême droite et des populismes en Europe, les mouvements sociaux en Grèce, en Espagne, la crise en Italie, etc, traduisent une perte de confiance sans précédent les peuples à l'encontre des technostructures. Jamais les acteurs du terrain n'ont eu un tel sentiment d'être aussi peu entendus par les décideurs et les spécialistes qui les conseillent.

Je soutiens ce rapport, en ce que, dans le contexte du "grand emprunt" et de la crise de trésorerie et de recrutement que traverse les entreprises et les SS2i informatiques, il pose un certain nombre de données que je partage, malgré certains aspects que je récuse. Par exemple la confusion entre services et licences qui remonte aux accords AGCS est l'une des causes de la crise financière. L'effet de mode du cloud computing ne fait qu'amplifier le mouvement.

Mais pour ce qui concerne l'enseignement, notamment secondaire et primaire, ce rapport n'est pas à la hauteur des enjeux.

Librement,
Charlie

5. On Monday, July 18 2011, 11:00 by Philippe-Charles Nestel

Une pierre à l'édifice qui renforce les aspects positifs du rapport.

Si l'informatique n'est pas à proprement parler une industrie, le logiciel libre contribue indéniablement au développement de l'industrie.

En témoigne le très copieux dossier sur l'événement "R&D industrielle d'expertise et open source : un avenir commun ?" publié le 7 juillet dernier par Stéphane Andrieux sur le site :
innovation.edf.com/recher...
07/07/2011

Bonne lecture

Charlie

6. On Monday, July 25 2011, 09:13 by Eschyle

Une petite chose me turlupine.
Les groupes de logiciel libre se sont-ils constitués avant ou apres les discussions savantes sur leur esprit? A l'évidence avant.
L'industrie du logiciel en France existe elle-aussi depuis bien avant les réformes proposées. Alors que viennent elles faire? embrigader un système existant qui ne va pas si mal.
Gouvernement, fais nous de bonnes lois et nous ferons le reste, sans toi, mieux que toi. Commence donc si tu veux être utile par mettre fin aux closes léonines des contrats de licence de logiciel, étend la définition du vice caché au bug logiciel, bref mon cher gouvernenemnt fais ton TRAVAIL.

PS qui parmi les membres du groupe a ECRIT, je veux dire par là FAIT, plus de cent lignes de libre?

7. On Monday, July 25 2011, 10:08 by Roberto Di Cosmo

Cher Eschyle, je t'invite à adresser tes remarques (que je partage en partie, par ailleurs, il suffit de lire mes prises de positions datant d'il y a 13 ans) au gouvernement directement.
Les écrire ici, de façon anonyme en plus, n'a aucune utilité.

Une suggestion, aussi: il vaut mieux éviter de decredibiliser totalement ses propres propos avec des fausses questions, par ailleurs non pertinentes, sur qui aurait écrit du logiciel libre...

8. On Monday, July 25 2011, 10:56 by Eschyle

Merci du tutoiement mon cher Robert,
Nous ne sommes évidement pas d'accord sur l'utilité de mes propos
ni sur leur pertinence, non plus que sur le choix que j'ai fait du lieu
où les tenir.
Mes questions sont par ailleurs de vraies questions, libre à chacun de
ne pas souhaiter y répondre.
Quand à l'anonymat, c'est parfois la sauvegarde de la démocratie.
Mais c'est promis, mon cher Robert, je ne vous ennuierai plus avec cela.

9. On Thursday, March 1 2012, 11:09 by hamac

Un rapport très détaillé qui a le mérite de mettre en lumière les grands enjeux de la filiere logiciel en France !

Elza

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