Musique, droit d'auteur, taxes: comment on detourne la Licence Globale
By Roberto Di Cosmo on Tuesday, January 12 2010, 22:00 - Informatique et Société - Permalink
Cela fait un certain temps que je ne réagit pas aux projets désastreux de mis à mal de l'Internet ou de taxation abusive qui sont portés par les tenants de l'industrie traditionnelle du disque. Ma dernière prise de position publique à ce sujet remonte à juin 2009 , mais il est bien vrai que je n'ai pas pris le temps d'écrire un deuxième volet de la lettre ouverte à Eddy Mitchell de Janvier 2006.
J'avais indiqué à la fin de cet article que la limite de la dépense acceptable par les ménages en frais de loisirs musicaux est déjà atteinte. À partir de ce constant, mon courrier à Eddy Mitchell, essayait d'expliquer, en faisant des calculs simples (mais pas simplistes) que les ennemis des artistes, compositeurs et interprètes ne sont pas les 'pirates', mais les intermédiaires qui absorbent la quasi-totalité de nos dépenses de consommateurs.
Je lui expliquais aussi qu’avec une licence globale très modique (quelques euros par mois) on pouvait réunir un pactole largement supérieur à celui que les artistes, compositeurs et interprètes reçoivent aujourd'hui, tous supports confondus. En échange de cette modeste contribution individuelle, les artistes gagneraient le double, et l'ensemble de la population aurait un accès libre à la culture musicale, sans aucun besoin de mettre en place des usines à gaz comme l'Hadopi.
Dommage qu'il n'ait pas souhaité répondre (j'avais envoyé une copie papier aussi à son agent, au cas où le mot Internet aurait été absent de son dictionnaire).
Mais j'admets aussi que je m'étais arrêté à moitié chemin: s'il est facile de récolter ce pactole (environ un démis-milliard d'euros par an), il est par contre plus difficile de le répartir de façon à éviter les dérives.
J'ai déjà eu occasion d'expliquer à bien de reprises, depuis 2005, à quelque responsable politique que si on veut maximiser la création (ce que tous disent vouloir), il faut utiliser une fonction concave de répartition, et non pas la fonction linéaire utilisée normalement par les mayors, qui aboutit à des effets de monopole et de monoculture.
Comme j'ai eu plusieurs dossiers critiques à suivre, je n'ai pu trouver le temps de mettre ça au propre sur ce blog... je me disais que ce n'était pas urgent.
J'avoue avoir sous-estimé la mauvaise fois des tenants de l'ordre passé: on découvre maintenant que le rapport Zelnik préconise d'instaurer une taxe sur Internet (on parle aussi de taxer Google), qui aboutirait à maintenir les bénéfices des intermédiaires de la musique, sans aucun avantage pour les artistes, et aucun gain pour nous, le public.
Donc, je me pose la question de savoir s'il vaut encore la peine de prendre quelques nuits pour mettre bien au propre un modèle de répartition des gains obtenus par biais de Licence Globale en utilisant une fonction concave.... faites-moi signe si vous pensez que c'est le cas, et encore plus si vous avez envie de donner un coup de main à peaufiner la théorie.
Comments
Dans le billet "Lettre ouverte à Monsieur Eddy Mitchell", vous écrivez que la licence globale "rapporterait 432 millions d'euros, dont 216 millions directement aux artistes". Où irait les autres 216 millions ?
Je vous conseille la lecture de "La bataille Hadopi", disponible sur InLibroVeritas (www.ilv-bibliotheca.net/l... Il y est exposé des idées alternatives ou complémentaires à la licence globale. Nul doute qu'un article de votre part dans ce livre aurait été précieux, mais il n'est pas trop tard pour nous donner votre avis.
Pour Manuell: j'avais pris l'hypothèse qu'on repartisse les fruits de la Licence Globale de la même manière que ceux de la taxe sur la copie privée, pour laquelle on peut estimer à 37,5% la part de auteurs, 18,75% la part des artistes-interprètes, 18,75% la part des producteurs et 25% les actions en faveur de la culture. Tous 'createurs' confondus, donc, on est à environ 50%, le reste allant en partie aux fonds en soutien de la culture et en partie au producteurs (pas aux distributeurs, parce-que on considère qu'ils n'ont pas à percevoir de remuneration pour ce qu'ils n'ont pas distribué).
Bien évidemment, on pourrait proposer autre chose, mais ce n'était pas mon propos.
Pour Motofix: merci pour le commentaire; il y a bien évidemment bein de possibilités de régimes alternatifs, mais ce que j'aimerais faire est mettre les politiques devant leur responsabilités: comme ils mettent toujours la 'création' en avant pour justifier des délires législatifs, ou des taxes sans contrepartie, il faut les confronter à une proposition qui favorise vraiment la création.
Tu cherches une clé de répartition.
Voici un lien que je viens de trouver dans un commentaire dans LeMonde.fr
owni.fr/2009/12/08/david-...
Il y a six modèles économiques développés dont quatre ou cinq s'appuient sur une entité qui fait le marketing. Et à chaque fois il y a le risque que cette entité applique un filtre, en investissant plus dans les artistes susceptibles d'être les plus rentables.
On a donc une spirale marketing->succès->marketing qui ne commence pas forcément par le succès. Ca veut dire que le filtre qui est appliqué au départ est calibré lui-même sur une clé de répartition qui échappe au contrôle des artistes.
Je pense qu'on peut en tirer deux conclusions.
La première peut contrecarrer les arguments contre la licence globales qui prétendent que cette licence dépouille les artistes du contrôle de la diffusion de leur oeuvre: en fait c'est déjà le cas. Et c'est bien expliqué dans les premiers modèles.
La deuxième, c'est qu'il existe déjà au moins une clé de répartition, qui est parfaitement subjective et injuste, mais c'est celle là qui conditionne aujourd'hui les revenus des artistes. Toute autre technique de répartition un tant soit peu scientifique et basé sur le succès effectif ne peut qu'être meilleure.
Le principal inconvénient de la licence globale est qu’elle fait payer ceux qui ne consomment pas, un peu comme la redevance tv et qu’elle risque fort de ne pas être suffisante pour financer la production cinématographique bien plus couteuse que la musique.
Mais c’est évident que c’est celle qui est le plus adaptée au sens de l’histoire
www.kelnoce.fr/prestatair...